Il s’agit d’une règle informelle : De manière quasi systématique, les milieux économiques soutiennent les partis de centre-droite – également sur le plan financier – à l’approche d’élections ou de votations. Le dernier exemple en date nous vient de la ville de Zurich. Ainsi, l’économie, dont font partie intégrante les banques, s’est regroupée afin de parvenir à un renversement politique à droite. Les candidats UDC, PLR et PDC ont donc été soutenus, avec l’habituel coup de pouce financier.

A ceux qui pensent que le rejet de la Lex USA par l’UDC et le PLR représente une preuve d’émancipation de leur dépendance vis-à-vis des milieux financiers, il suffit de leur rappeler l’exemple ci-dessus. Il apparaît alors très rapidement qu’il ne s’agit-là que d’une manœuvre de dissimulation, aussi surprenante que vaine, de la part du chaotique pilote en chef du PLR. Au même titre, leur rôle d’acteur se poursuit avec la peur d’un préjudice ou d’une invitation aux autres pays à fonctionner de la même manière que les USA. En réalité, aucun autre pays ne possède des moyens de pression comparables à la superpuissance américaine. Il y a cependant une explication particulièrement convaincante : Pour ces deux partis, la bousculade pour leur 2ème  siège au Conseil fédéral a déjà débuté et l’objectif est d’ores-et-déjà très clair ; il s’agit de désavouer leur ennemie préférée, Eveline Widmer-Schlumpf.

Alors pourquoi le PS se retrouve-t-il embarqué sur le même bateau que ces deux partis sur la question de la Lex USA ? On ne choisit pas toujours les personnes qui voyagent en même temps que nous, surtout lorsque nous étions les premiers à bord. Le PS a décidé, suite à d’intenses discussions et une étude approfondie des dossiers (tout du moins du peu d’informations à disposition des parlementaires), de rejeter cet exercice de sauvetage des banques, conduit au travers d’un procédé particulièrement douteux pour un Etat de droit et une démocratie comme les nôtres.

Depuis que je suis venue au monde, soit plus de 34 ans, le PS s’est toujours engagé pour une place financière propre, à l’époque déjà avec une initiative sur les banques, dont les exigences ne sont à ce jour toujours pas remplies. La défense de la fraude fiscale et des affaires effectuées avec de l’argent soustrait aux autorités fiscales ne sape pas uniquement le service public, mais met en danger la paix et la cohésion sociale de tout Etat de droit et de toute société. La Loi spéciale proposée tire un trait définitif sur le passé de fraude fiscale de la place financière. Au contraire, au travers d’une procédure urgente et limitée dans le temps, des lois suisses doivent être suspendues. Une solution durable ne se présente pas comme ça et c’est pourquoi, puisque notre objectif reste de construire une place financière propre et conforme au droit fiscal, nous recherchons désespérément des partenaires pour y parvenir. De plus, le rejet de toutes nos interventions au cours de la session extraordinaire pour une place financière conforme aux règles de la fiscalité et échange automatique d’informations démontre que nous sommes toujours seuls sur ce terrain.

Il est par ailleurs particulièrement encourageant de voir qu’un économiste comme Aymo Brunetti, qui a construit sa réputation en qualité de gardien de la doctrine libérale, fournisse un rapport au Conseil fédéral, en recommandant ce que le PS répète depuis des années : La Suisse doit introduire l’échange automatique d’informations avec l’OCDE et l’UE. Malheureusement, le Conseil fédéral a laissé passer sa chance à la réception dudit rapport, en persévérant dans sa position, refusant d’affronter la réalité. Quant au PLR, ne pouvant accepter que l’on puisse intervenir sur la politique financière sans filtre idéologique et avec une certaine clairvoyance, il préfère dépeindre Brunetti comme un activiste de gauche. Le chemin qui mènera à une place financière au service de la population et sans qu’elle ne soit accaparée par les banques sera encore long et sinueux.

Je me réjouis de voir comment les représentant-e-s du PLR et de l’UDC expliqueront leurs votes contre les intérêts des banques et, dans le même temps, leur opposition à une place financière d’avenir, pour laquelle, il n’y aurait plus besoin de loi urgente ou autre solution globale. Finalement, ils ont toujours accepté l’argent des banques sans jamais rechigner. A l’inverse, les banques devront maintenant définir si elles vont mettre un terme à leur histoire d’amour avec les partis de centre-droite. La transparence est plus que jamais une nécessité.

Par amour de la place financière suisse…

20. juin 2013