En Suisse, les loyers illégalement élevés sont la première cause de diminution du pouvoir d’achat. Mais la majorité de droite de la Commission des affaires juridiques du Conseil national (CAJ-N) ne souhaite apparemment pas s’élever contre le fait que les loyers étaient, rien que l'année dernière, 10,5 milliards trop élevés par rapport aux prescriptions légales. Elle a ainsi rejeté hier une initiative parlementaire du PS Suisse qui demandait une révision périodique des rendements locatifs. Parallèlement, la même majorité de la CAJ-N a approuvé trois projets du lobby immobilier visant à réduire la protection des locataires contre les résiliations de bail.

Pour la grande majorité des personnes en Suisse, le poste de dépense le plus important dans le budget est le loyer, et celui-ci ne cesse d'augmenter. « C'est une perte de pouvoir d'achat, ce d’autant plus que la loi fixe le niveau maximal du loyer », déclare le conseiller national socialiste Baptiste Hurni (NE). « Ici, l'argent est transféré de la poche de la population active à celle des propriétaires immobiliers au-delà de ce que la loi prévoit. C'est choquant, car la population compense cette diminution de pouvoir d'achat en allant moins souvent manger à l'extérieur, en passant moins de week-ends à la montagne et en devant se résoudre à acheter des biens bon marchés, mais produits dans des conditions douteuses »
 
Protéger le pouvoir d'achat par un contrôle périodique des rendements locatifs
Pour mettre fin à cette situation inacceptable, le PS Suisse a déposé une intervention qui prévoit un examen périodique (révision) des rendements locatifs. Les entreprises connaissent déjà cet instrument avec la révision périodique de l'AVS, la révision de la TVA, et la révision générale des impôts. « Il n'est pas étonnant que la droite rejette cette proposition. Ses élu-es ont en effet introduit de facto un loyer de marché sans toucher à la loi. Ils savent très bien que s'ils inscrivaient officiellement dans un changement du système de loyer basé sur les coûts à un système de loyer basé sur le marché, ils n’auraient aucune chance devant le peuple », explique Baptiste Hurni.
 
Les loyers augmentent jusqu'à 370.- par mois
En 2017 déjà, une étude de la banque Raiffeisen constatait que les loyers en Suisse étaient 40 % trop élevés. Notre droit du bail exige que les loyers évoluent en fonction des coûts réels du capital. En conséquence, les loyers auraient également dû baisser au cours des 15 dernières années en raison de la baisse extrême des taux hypothécaires. Or, ils ont massivement augmenté. Une étude publiée en février sur mandat de l’Asloca a confirmé le constat de l'étude Raiffeisen : au cours des 15 dernières années, les locataires ont payé 78 milliards de francs de loyers en trop, dont 10,5 milliards rien que l’année dernière. Cela représente 370 francs par mois et par ménage !
 
Le lobby immobilier à la manœuvre
En approuvant trois autres projets hostiles aux locataires, la majorité de droite de la CAJ-N a ouvert la voie à l'affaiblissement de la protection des locataires. « Ces attaques visent à faciliter les congés pour mettre la pression sur les locataires et pour augmenter les loyers. Les hausses les plus fortes se font au changement de locataires. Les bailleurs vont encore augmenter leurs profits abusifs, alors que les loyers représentent déjà une charge insupportable pour les ménages », déclare le conseiller national socialiste Christian Dandrès (GE). Le PS Suisse n'acceptera pas ce démantèlement de la protection des locataires.

24. juin 2022